Que dire de la COP27 (Climat) qui a s’est tenue en novembre en Egypte ? Remarque préliminaire : évaluer l’impact que peut avoir une COP ne peut sérieusement se faire qu’avec un recul de plusieurs années. Par exemple, la COP15 en 2009 à Copenhague, qualifiée d’échec par la majorité des commentateurs, a en fait ouvert la voie à la COP21 de 2015, reconnue quasi-unanimement comme un succès historique, même si, 6 ans après la ratification de l’Accord de Paris, les impacts concrets se font attendre et restent bien moindres que ce qu’a accompli le Covid-19 par exemple.
Brèves conclusions de la COP27 à ce stade :
Cette COP a produit un accord minimaliste mais portant un symbole important, « un accord révolutionnaire visant à fournir un financement pour les « pertes et dommages » aux pays vulnérables », écrit l’ONU.
Ce financement promis reste relativement faible (100 milliards de $ par an), bien tardif (sur la table des négociations depuis 2006) et encore très loin d’être concrétisé.
On observe surtout que le clivage s’exacerbe entre pays riches, responsables historiques du changement climatique, et pays pauvres, significativement impactés. Ce clivage existe depuis les premières COP climat et ne fait que s’amplifier à chaque décennie, alors que la responsabilité historique des pays riches et des plus riches en leur sein, est de mieux en mieux connue et documentée (cf. extrait du rapport du GIEC n°6 WG3 de 2022 sur la responsabilité centrale du monde occidental : « Emissions have grown in most regions but are distributed unevenly, both in the present day and cumulatively since 1850: 50% of the cumulative emissions is coming from North America and Europe including Eastern Europe and West-central Asia), representing 16% of the current mankind population »). Or, mécaniquement, sous l’effet de la dégradation du fonctionnement de la biosphère, dont l’inertie est considérable notamment pour le climat, l’instabilité du monde ne peut que grandir au fur et à mesure que les dégâts du changement climatique s’amplifient. Ainsi, ce constat d’injustice, de plus en plus révoltant d’année en année pour les pays vulnérables, est source d’une colère, perceptible à la COP27, et qui ne peut que croître.
Les COP ont-elles, in fine, un impact sur le monde réel ?
En général, non. Parce qu’elles ne produisent pas d’accords contraignants. Elles produisent au mieux des recommandations, de l’influence et de l’éveil médiatique, ce qui n’est pas inutile. La COP21 (2015) a ainsi mis en avant les fameux « +1,5°C » et « bien en-dessous de +2°C » d’augmentation de la température moyenne mondiale en 2100 comparée à l’ère préindustrielle. Les entreprises et les acteurs financiers peuvent désormais compter sur des concepts comme la hausse de température induite, l’alignement à l’Accord de Paris ou encore les ambitions et coalitions « net-zero » pour revoir leur stratégie de développement et « quantifier » leurs impacts et leurs ambitions à venir.
Et la suite ? La COP15 de la Convention on Biological Diversity vient tout juste de se tenir. Bonne nouvelle : le sujet de la nature, terme plus compréhensible que la biodiversité et repris par la TNFD (Taskforce on Nature-related Financial Disclosures) au niveau mondial, rattrape son retard sur le climat. Une partie de la finance découvre que le fonctionnement de la biosphère est systémique, entremêlé, très complexe et que le climat n’est que la partie médiatiquement émergée de l’iceberg (qui fond) des services rendus par les écosystèmes. Car le climat n’est qu’une pression parmi les 5 principales exercées sur la nature par l’action des humains selon l’IPBES , une des 9 limites planétaires et, parmi les 6 limites planétaires dépassées , celle qui l’est le moins…
Au-delà des COP
Plus concrètement, que pouvons-nous faire dans ce contexte en tant qu’épargnant, d’une part, et société de gestion d’autre part ? Face à l’immensité du défi à relever, tous les leviers sont à utiliser au maximum, bien sûr. Celui de l’épargne reste encore méconnu et sa puissance est souvent sous-estimée. Epargner n’a rien d’un geste neutre.
Plus de 99,9% de l’empreinte biodiversité et de l’empreinte carbone de Sycomore AM se trouvent dans les portefeuilles que nous gérons. Et notre deuxième poste d’émissions de gaz à effet de serre se trouve dans l’épargne salariale de nos employés. Pour naviguer dans la transition écologique, nous utilisons la NEC, Net Environmental Contribution, indicateur scientifique, transparent et accessible, permettant la comparabilité de toutes les activités économiques et de tous les produits financiers. En 7 ans, notre fonds Sycomore Europe Eco Solutions, lancé quelques mois avant la COP15 (Climat), est devenu l’un des fonds phares de notre gamme. C’est aussi celui dont la NEC est la plus élevée et le seul fonds labellisé Greenfin de notre gamme. Nos clients ne s’y sont pas trompés et qu’ils en soient remerciés. Alors continuons à réfléchir avant de choisir nos placements.
Pour les gérants de fonds et les analystes, il y a enfin quelques questions incontournables :
Les risques physiques au sens de TNFD vont continuer à augmenter : nous devons nous interroger en tant que société de gestion sur le rôle qu’ils jouent dans notre gestion des risques et dans nos stratégies d’investissement. Est-il suffisant ? Comment l’augmenter ? En quoi la mesure des impacts et des dépendances peuvent-ils nous y aider ?
La question de la résilience des modèles économiques devient de plus en plus structurante pour juger de leur durabilité. Ainsi, dans un monde qui rentre dans une démondialisation partielle, avec des tensions accrues sur les ressources, des pandémies plus fréquentes (cf. la Fabrique des Pandémies ) et où la santé environnementale devient un sujet sociétal mondial (comme bien illustré par exemple lors de l’Université de la Terre à l’UNESCO ), le risque de transition est mécaniquement accru. Là aussi, nous devons nous interroger en tant que société de gestion sur le rôle qu’il joue dans notre gestion des risques et dans nos stratégies d’investissement, et en particulier, comment mieux détecter les entreprises fortement exposées au risque de transition, comment détecter les activités qui font de moins en moins de sens sur le plan social, comme la publicité, le luxe ou l’ultra-mobilité, celles qui sont piégées dans leurs chaînes de valeur, promises à devenir des actifs échoués (« stranded assets »), dont l’utilité sociétale est questionnable et dont la NEC est fortement négative, sans perspectives solides pour qu’elle augmente.
Le pendant positif de ce cadre en tension est l’augmentation des opportunités sur le front des transitions. Comment mieux détecter les entreprises en transition, dont la NEC augmente et que nous appelons Eco-Transitions, les modèles économiques de l’adaptation au changement climatique, ceux de l’économie régénérative, du slow business et de la low tech ?
Un vaste programme pour les mois et les années à venir…
La durabilité au cœur de nos analyses et de nos investissements
Afin de mesurer la capacité des modèles économiques à répondre aux grands enjeux environnementaux et sociaux pour sélectionner les plus durables, Sycomore AM développe depuis plusieurs années des métriques et méthodologies spécifiques permettant de :
La NEC, Net Environmental Contribution
La Contribution Sociétale
The Good Jobs rating
SACRE
La charte Good in Tech
Dans notre démarche d’investisseur responsable, il est essentiel d’analyser et de pouvoir mesurer. Mais il faut aussi savoir accompagner. L’engagement actionnarial de Sycomore AM se matérialise dans l’exercice de nos droits de vote, dans notre participation à des initiatives d’engagements collaboratifs, mais aussi dans les dialogues que nous menons avec les entreprises de notre univers d’investissement qui ont défini des plans de transition robustes.