Votre navigateur est obsolète! Essayer d’ouvrir cette page web sur un autre navigateur.
Aller au contenu
Publications
19 août 2020

Evolution des modes de travail et des marques employeurs

Jérémy Clédat est le co-fondateur de Welcome to the Jungle, plateforme spécialisée dans le recrutement. Elle a déjà conquis la France avec des clients comme Doctolib, Carrefour, Louis Vuitton et 2 200 autres entreprises, et vient de lever 20 millions d’euros auprès de Gaia Capital Partners, d’actionnaires historiques (BPI France, XAnge et Jean-Paul Guisset) et de co-investisseurs comme MAIF Avenir, pour accélérer son développement en Europe et se positionner sur le marché des logiciels d’entreprise. Jérémy nous donne son point de vue sur les évolutions des modes de travail et des marques employeurs.


Le monde du travail vient de connaître un véritablement chamboulement. Après plus de deux mois de confinement, quel est le bilan pour le télétravail ?

Avant la crise sanitaire et le confinement, on manquait encore d’arguments pour inciter les entreprises à mettre en place le télétravail, ou à en élargir le cadre. Je dirais même qu’il y a 6 mois, beaucoup se demandaient encore s’il était possible, et même souhaité, pour le bon fonctionnement d’une organisation. Et puis voilà qu’en l’espace de quelques jours, des millions de personnes travaillent à distance. Force est de constater que c’était donc possible ! Et bénéfique : la grande majorité des entreprises avec lesquelles nous discutons, et notamment celles qui avaient du mal à se positionner sur le sujet, observent une augmentation moyenne de la productivité des équipes de l’ordre de 15 à 20%. Cette prise de conscience est de bon augure pour accélérer la tendance post-crise et convaincre les plus récalcitrants.

D’autant qu’il y aussi un vrai argument financier qui milite pour plus de travail à distance. Plus encore en période de crise, nombre d’entreprises a besoin de réduire leurs coûts. Ces modes de travail plus hybrides permettent de revoir à la baisse la surface de bureaux nécessaire, de 20 à 30% environ… Ils participent aussi à réduire drastiquement les trajets domicile- travail, et ont donc un impact écologique fort - on l’a tous vu pendant le confinement- et un impact indéniable sur le bien-être des collaborateurs.

Chez Welcome to the Jungle, nous sommes convaincus de l’intérêt du télétravail depuis les tout premiers jours de la création de l’entreprise. Avant même le confinement, 20% de nos équipes travaillaient 100% à distance et vivaient hors région parisienne. Notre charte donnait déjà la possibilité à l’ensemble de nos collaborateurs de pouvoir passer 50% de leur temps de travail à distance.

Qu’est-ce que cela change en matière de recrutement – pour le candidat et pour le recruteur ?

Les mentalités sont en train d’évoluer dans le domaine, tant côté candidat que recruteur. La plupart des entreprises étaient par exemple très réticentes à embaucher à distance. L’entretien physique était jusqu’alors quasi sacré dans le processus de recrutement. Beaucoup ont été contraintes de s’y mettre pour recruter, et même intégrer la nouvelle recrue à distance pendant le confinement - un vrai challenge. Un certain nombre de préjugés volent désormais en éclats, parce qu’on s’aperçoit que ça fonctionne, différemment, mais ça fonctionne.

J’ai le sentiment qu’avec ce que nous venons de vivre, le télétravail est devenu, à une vitesse folle, un véritable acquis social, au même titre que d’autres. Dans les prochains mois, les entreprises qui n’autoriseront pas le travail à distance, et dans des conditions souples pour le collaborateur, ne seront plus du tout en phase avec le marché de l’emploi. Je suis même convaincu que ce sera un frein très fort à leur capacité d’attirer des talents, et de les retenir.

Le télétravail offre aussi une grande flexibilité dans notre rapport au temps et il rend l’entreprise plus inclusive, lui permettant de recruter des profils auxquels elle n’avait pas accès avant. C’est un point majeur pour les parents notamment : nombre d’études l’ont démontré, beaucoup de mères s’imposent des barrières énormes à postuler à certains postes ou dans certaines industries, parce qu’elles considèrent que le rythme de travail n’est pas adapté à leur vie personnelle. Le télétravail élargit le champ des possibles, pour le candidat et pour le recruteur.

Par exemple, on parle beaucoup des talents digitaux et de la tech. Aujourd’hui, les entreprises ne peuvent les « chasser » que dans un périmètre relativement restreint -Paris notamment en France- alors qu’il y a des talents partout. Si l’on recrute sans se soucier de la géographie, on se donne la possibilité de rencontrer plus de talents, et on leur offre leur chance. Dans notre équipe tech d’ailleurs, beaucoup de collaborateurs ne vivent pas en région parisienne, et ce n’est absolument pas un frein à l’activité au quotidien. Je suis convaincu que cette évolution sera très positive pour le monde du travail.

Y-a-t-il, selon vous, un risque de dumping social ?

Le récent discours de Mark Zuckerberg chez Facebook -qui a annoncé généraliser le télétravail et souhaiter ajuster à terme les salaires en fonction du lieu de résidence des collaborateurs- laisse effectivement présager la dérive vers un dumping social de certains acteurs. Sa forme serait d’ailleurs assez nouvelle : quand on pense dumping social, on l’imagine naturellement dans des industries très manufacturières, entre l’Europe/les États-Unis et l’Asie. Aujourd’hui, il pourrait être bien plus complexe, dans de nombreux secteurs, intra-pays (de San Francisco vers une ville dans le Wyoming par exemple, de Paris vers Angoulême). Cela peut être très dangereux.

Ce phénomène soulève selon moi une problématique plus profonde : parviendra-t-on un jour à décorréler la valeur du travail fourni et le lieu de travail/de résidence de la personne ? C’est certainement utopique, pourtant cela permettrait de développer les territoires, relocaliser certaines activités, créer de nouveaux bassins d’emplois de grande qualité.

Se dirige-t-on vers une généralisation du travail à distance ? Quels sont les défis que cela représente pour l’entreprise ?

Certes, le confinement a imposé l’urgence de mettre en place des choses qui auraient normalement nécessité des mois d’adaptation. Pour autant, nous avons le sentiment que, pour instaurer une véritable culture du travail à distance, qui fonctionne pour tous et dans le temps, il faut prendre le temps d’y réfléchir et procéder par étape. Se précipiter, c’est forcément dangereux. Je suis très étonné d’entendre des entreprises annoncer qu’elles se séparent de leurs bureaux et passent 100% en télétravail. Ces pratiques nécessitent un changement de culture très important, bouleversant. Elles supposent d’appréhender une nouvelle manière de travailler, axée sur une communication asynchrone, dans laquelle l’écrit est essentiel, voire incontournable.

Je ne pense pas non plus qu’instaurer le télétravail en mode réactif, pour satisfaire la demande des collaborateurs, puisse fonctionner dans le temps et pour le groupe. Il faut nécessairement faire évoluer sa culture d’entreprise pour qu’elle fonctionne avec des salariés à distance : développer les bons outils, s’assurer que tous les managers sont convaincus et que cela ne représente pas une difficulté managériale supplémentaire. Le télétravail sanctuarise aussi le sujet de la confiance : il faut être certain de pouvoir faire confiance aux collaborateurs pour qu’ils travaillent efficacement de chez eux.

Je pense qu’il est également indispensable d’éliminer au maximum les facteurs qui donnent l’impression à celui qui n’est pas physiquement présent qu’il se prive d’une partie de la vie d’entreprise, que son rôle dans l’organisation perd de la valeur, que cela freine sa carrière. Ces éléments de culture doivent être validés par tous : cela passe par une communication interne très engagée sur le sujet, pour expliciter aux yeux du groupe que c’est une pratique courante, et totalement validée à tous les échelons de l’entreprise.

Chez Welcome to the Jungle par exemple, nous avons choisi de mettre à disposition un parcours de formation interne pour nos collaborateurs qui découvrent le télétravail ou qui souhaitent passer en 100% distanciel. C’est essentiel pour nous de formaliser ces pratiques, pour permettre à chacun de peser le pour et le contre, de se rendre compte des implications et de s’y préparer.

La force de la culture d’entreprise est primordiale, dans la mise en oeuvre du télétravail, mais surtout dans la capacité à générer de la croissance. Qu’en est-il selon vous ? Qu’est-ce qu’une bonne marque employeur aujourd’hui ?

La culture d’entreprise se matérialise souvent par les échanges avec les gens ou par les bureaux. Aujourd’hui, ça ne peut plus fonctionner ! Je suis persuadé qu’il faut désormais faire vivre sa culture d’entreprise par l’écrit. La communication interne, au sens large, est centrale pour rappeler ce qui fait sens pour l’entreprise et comment les objectifs de chacun sont alignés avec la mission. Dans la société dans laquelle nous évoluons, c’est plus que jamais un sujet de cohérence entre le discours que l’on tient, la manière dont on conçoit nos produits et services, et notre raison d’être. Cette période de crise en est l’illustration : je trouve que la facilité avec laquelle les entreprises parviennent à gérer la situation avec leurs clients, à rassurer les équipes tout en les engageant, est particulièrement liée au niveau de transparence et de sincérité dans leur communication. Cela joue un rôle majeur dans l’engagement des collaborateurs, et dans leur volonté de rester pour participer à la reprise. Les marques employeurs les plus fédératrices sont celles au sein desquelles les collaborateurs sont en phase avec le message que l’entreprise véhicule en interne et en externe. Ils sont à même de dire « oui, il s’agit bien de l’entreprise pour laquelle je travaille, sans aucun doute ». Le collaborateur doit reconnaître son entreprise, et se reconnaître dans sa mission. Vos salariés, et vos candidats d’ailleurs, sont vos meilleurs ambassadeurs. De toute façon, je suis convaincu qu’il est vain d’essayer de cacher qui l’on est vraiment dans sa communication, car cela ne sert à rien d’attirer des gens qui ne vous correspondent pas. C’est une perte de temps et d’argent pour l’entreprise. Selon la DARES, 36% des CDI en France sont rompus dans les 12 mois suivant la signature du contrat, alors que le coût d’un recrutement raté est estimé à environ 12 à 18 mois de salaire.

Aujourd’hui, l’engagement de l’entreprise est un sujet omniprésent, et très scruté. La sincérité des sociétés sur des sujets d’engagement social, sociétal ou environnemental, a un impact extrêmement important sur leur capacité à attirer les clients et les talents. On ne peut plus s’inventer un positionnement. On voit déjà des entreprises pénalisées par leurs comportements en matière de recrutement, notamment sur le thème de la diversité. Le constat est le même dans les industries très éloignées des enjeux environnementaux.

Même dans le domaine de la tech, les difficultés médiatiques que les grands acteurs rencontrent vis-à-vis de leurs engagements ESG sont déjà un frein au recrutement et à la rétention. J’ai la certitude que ces entreprises seront de plus en plus en décalage avec les attentes de candidats potentiels.

Pourriez-vous nous présenter les logiciels d’entreprises que vous avez développés pour améliorer l’expérience de recrutement ?

La mission de l’entreprise que nous avons créée en 2015, c’est de repenser l’expérience de travail, à la fois dans la recherche d’emploi et le recrutement, et dans l’engagement dans l’entreprise. On avait à l’époque constaté que la principale souffrance lorsque l’on postule, c’est de ne pas avoir de réponse. C’est pourquoi nous avons très vite souhaité mettre à disposition de nos clients un outil collaboratif pour améliorer l’expérience candidat à chaque étape du recrutement. Le Welcome Kit offre une vitrine aux marques employeurs grâce à un site carrière clé en main et personnalisable, sur lequel elles peuvent mettre en avant leur culture d’entreprise, présenter leur cadre de travail, réaliser des interviews de leurs employés, publier des articles sur la société, et poster leurs offres d’emploi. L’outil permet de gérer efficacement les candidatures en facilitant les interactions avec les membres des équipes et en structurant le processus. C’est un gage d’excellence pour l’entreprise qui souhaite offrir la meilleure expérience possible à ses candidats, tout comme elle le fait pour ses clients. Aujourd’hui, plus de 3 000 entreprises recrutent avec Welcome Kit.

Nous avons également développé un média spécialisé autour du travail, grâce auquel nous proposons de nombreux contenus web et vidéo sur des sujets aussi vastes que le recrutement, les métiers, les bonnes pratiques, avec l’objectif de donner à réfléchir aux candidats et aux recruteurs.

Pendant le confinement, nous avons lancé Welcome Home, un intranet qui vise à faciliter l’intégration des nouvelles recrues et améliorer le dynamisme de la vie d’entreprise. On y retrouve trombinoscopes, contacts, profils enrichis pour savoir qui fait quoi dans l’entreprise. Nous sommes convaincus que disposer d’un intranet bien conçu, intuitif et axé sur la culture d’entreprise est essentiel. C’est un outil puissant de partage des informations et des connaissances. 250 entreprises utilisent déjà le logiciel.

Cliquez ici pour accéder à notre ISR Way 13 dont est tiré cet article.


Partager l’article

Evolution des modes de travail et des marques employeurs

Plus d’articles

Suivez nos actualités

Abonnez-vous à nos communications par e-mail en remplissant ce formulaire.
En cliquant sur « S’abonner », vous acceptez notre politique de confidentialité.